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OpiMedOpiMed : la tribune      L'ophtalmologiste face à une mesure illogique et médicalement anachronique.

Sur des données purement comptables, reprocher à l'Ophtalmologie un exercice excessif, c'est méconnaître certaines évidences :

- Le vieillissement de la population s'accompagne d'une augmentation constante des problèmes visuels, à l'exemple de la cataracte, dont l'opération est aujourd'hui l'intervention chirurgicale la plus pratiquée au monde !

- Certaines affections oculaires comme le glaucome, la dégénérescence maculaire liée à l'âge, l'amblyopie de l'enfant et d'autres, sont de réels problèmes de santé publique par leur fréquence et leur potentiel invalidant. Avant de les traiter, les spécialistes ont vis-à-vis d'elles un devoir de dépistage, et c'est le souci dominant de la plupart de leurs consultations. La population prend peu à peu conscience de ces risques grâce aux efforts du corps médical, de la presse et de campagnes médiatiques, il s'ensuit un accroissement du nombre d'examens, une évolution évidemment positive pour l'avenir.

Et voilà que sans tenir compte de ce rôle sanitaire, des représailles sont infligées à l'ophtalmologie pour une activité jugée abusive. Un arrêté ministériel diminue de 10% l'ensemble des cotations de la " Nomenclature " des explorations cliniques de la discipline. Le comble est que cette décision arbitraire frappe essentiellement les praticiens ayant fait le choix d'appliquer les tarifs conventionnels et qu'elle concerne des actes nécessitant un appareillage sophistiqué et coûteux. Il faut savoir que la spécialité vit en cette fin de siècle une mutation quasi explosive, les praticiens émerveillés voient se succéder des techniques dont certaines deviennent rapidement indispensables. C'est le cas de la périmétrie automatisée, examen incontournable du suivi évolutif et thérapeutique du glaucome. Le matériel nécessaire valable cinq ans, représente un investissement de 150.000 francs, un spécialiste du secteur I doit l'utiliser quatre années pour simplement l'amortir, à raison de 3 à 4 examens journaliers dont il consacre à chacun une demi-heure, pourtant sa cotation est dévaluée de K15 à K13… Des remboursements d'emprunts encore plus contraignants vont limiter les choix d'équipements, c'est le poids d'une mesure très mal ressentie.

Classiquement lors d'affections oculaires ou générales comme le diabète, quand plane la menace de déficit ou d'invalidité visuelle, la prudence incite à s'appuyer sur des notions de prévention et de diagnostic précoce où justement la réalisation d'examens de ce type est habituelle. Alors pourquoi décourager les initiatives privées ou publiques allant dans ce sens ?

La pratique de ces investigations a en plus de son intérêt médical indiscutable, un rôle de proximité, elle évite à des personnes âgées ou handicapées les difficultés de déplacements répétés vers un centre souvent éloigné. Est-il judicieux de dissuader des médecins d'investir, et par là de freiner la diffusion de nouvelles techniques vers des malades qui en ont besoin ?

Ainsi " la maîtrise des dépenses de santé ", par défaut d'information ou par décisions extrêmes, peut aller à l'encontre d'objectifs essentiels comme l'accessibilité à tous des meilleurs systèmes de soins et de prévention. De plus, l'Administration qui impose des efforts aux médecins, pourrait dans la même logique délester la TVA des investissements productifs de santé, qui également entrave l'acquisition et le renouvellement d'un matériel aux factures déjà démesurées. Or une médecine de niveau élevé est sans cesse évolutive, inutile d'en exagérer les charges.

Le secteur de base d'une spécialité sensorio-médico-chirurgicale est pénalisé par le biais de ses explorations instrumentales devenues au fil du temps des outils obligatoires. Beaucoup y verront l'injustice d'une mesure illogique, médicalement anachronique et contraire à certains concepts de santé publique. Si des économies étaient à faire, ce n'est pas de cette manière, et surtout sans rogner sur le terrain de l'indispensable, encore faut-il savoir où il se situe…

Jacques Delpuget (20/08/99)

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RETOUR      En passant à titre perso :

- Cela fait longtemps que les mesures d'économie n'obéissent plus à une stricte et unique logique médicale. Le cas de la décote brutale des actes d'ophtalmo peut se répéter à l'infini dans tous les secteurs de santé. Pas uniquement chez les médecins. Il suffit de regarder autour de soi.

- C'est assez surprenant, qu'à chaque fois on se retrouve dans le même cas de figure, les "économies de santé" c'est peut-être bien chez les autres, mais pas chez soi.

- Le problème c'est qu'en focalisant seulement sur son mode d'exercice, sans élargir à l'ensemble, on risque de se prendre les pieds dans le cas on ne peut plus classique de la division.. même si effectivement une analyse objective sur ce que l'on connaît est déjà une bonne chose.

- D'ailleurs le grand public est plus attentif à ce genre de démonstration spectaculaire (menace sur des actes essentiels d'un mode d'exercice, fin de la délivrance des médicaments à l'hôpital vers la fin de l'année, listes d'attentes...) qu'à des généralités sur l'avenir du système de santé.

- Désabusé : ...Et que finalement l'aiguillon du "porte monnaie" reste encore le plus efficace.

Richard Wild (19/09/99)  responsable du site  http://www.medito.com

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